Allocations familiales des travailleurs frontaliers. La Commission européenne pourrait aller devant la Cour de Justice

Publié le 21 octobre 2010
Rédigé par 
luxembourg

Ecolo Luxembourg, par la voix de la sénatrice Cécile Thibaut, se réjouit de la réponse de la ministre Onkelinx apportée à la sénatrice Dominique Tilmans lors de la séance plénière de ce jeudi 21 octobre. La ministre de la Santé et des Affaires sociales juge en effet que la suppression des allocations familiales dès qu’un étudiant a atteint 18 ans, compensée par l’octroi d’une bourse d’étude aux seuls résidents luxembourgeois constitue une discrimination. Cette position de la ministre est intéressante mais l’émoi et le regret face à l’absence de concertation exprimés auprès de sa collègue grand-ducale ne suffiront pas.

Ecolo Luxembourg ne cesse de le répéter depuis le début de l’été : cette mesure décrétée par le Grand-duché va à l’encontre du principe de non-discrimination entre les travailleurs qui est l’un des piliers de l’Union européenne. Dans cette perspective, les eurodéputés verts, Isabelle Durant et Claude Turmes, avaient en son temps adressé une question à la Commission, gardienne du traité, lui demandant sa position à ce propos.

Dans la réponse reçue hier, la Commission indique qu’elle est d’avis que « l’introduction d’une condition de résidence pour l’accès aux aides financières pour des études supérieures semble contraire aux règles communautaires applicables en matière de libre circulation des travailleurs, dans le sens où celle-ci aurait comme résultat d’exclure, comme bénéficiaires, les enfants de travailleurs frontaliers ».

Même si elle reste prudente, la Commission s’est donc bel et bien saisie du dossier. Elle précise qu’elle procède en ce moment à l’examen de la législation en cause et prendra toute l’information nécessaire. Pour, ensuite, sur la base de son enquête, prendre une décision quant à la suite à donner, y compris, le cas échéant, devant la Cour de Justice du traité pour manquement aux obligations qui découlent du traité de l’Union.

Ecolo Luxembourg prend note avec satisfaction de la position de la Commission européenne et reste attentif aux suites qui seront données aux plaintes introduites par les organisations syndicales.

Question avec demande de réponse écrite E-7652/2010

à la Commission

Article 117 du règlement

Isabelle Durant (Verts/ALE) et Claude Turmes (Verts/ALE)

Objet : Conséquences des mesures d’austérité décidées par le gouvernement grand-ducal sur les travailleurs belges résidant en Belgique

Cet été, la presse a donné un large écho au projet de loi 6148 voté le 13 juillet 2010 par la Chambre des députés du Grand-Duché de Luxembourg. Cette loi, qui sera d’application le 1er octobre prochain, supprime, pour tous les travailleurs luxembourgeois, les allocations familiales dès que l’enfant a atteint l’âge de 18 ans. Les mesures compensatoires prévues par le gouvernement luxembourgeois ne visent que les résidents du pays.

En Belgique, 37.000 résidents travaillent au Grand-Duché de Luxembourg, dont 27.000 sont domiciliés dans la province du Luxembourg. Cette mesure concerne donc une partie des Luxembourgeois qui travaillent comme ouvriers ou employés au Grand-Duché de Luxembourg.

Cette loi risque d’avoir des répercussions économiques et sociales dans la province du Luxembourg. En effet, dans de nombreux cas, ce sont les allocations familiales qui font la différence avec un salaire belge, ceci surtout pour les salaires les plus faibles.

De plus, la loi semble violer l’esprit du droit communautaire européen. Certes, les allocations familiales sont supprimées pour tous les enfants mais les allocations d’études seront octroyées aux seuls résidents. Au-delà du discours syndical, “À travail égal, les cotisations doivent être égales ainsi que les prestations sociales”, on peut considérer que la discrimination est réelle sur le plan moral.

Enfin, selon une extrapolation de l’OGBL (Confédération syndicale indépendante du Grand‑Duché de Luxembourg), le retour des travailleurs frontaliers au Grand-Duché de Luxembourg sous le régime des allocations familiales dans leur pays correspondrait à une dépense supplémentaire de 2.670.000 euros pour l’État belge.

La Commission s’est‑elle saisie de cette question de suppression des allocations familiales pour les travailleurs frontaliers employés au Grand-Duché ? Pense‑t‑elle qu’il y a là violation du droit communautaire européen ? Quelles mesures compte‑t‑elle éventuellement prendre ?

*****************************

E-7652/10/FR

Réponse donnée par M. Andor

au nom de la Commission

(21.10.2010)

La Commission est d’avis que l’introduction d’une condition de résidence pour l’accès aux aides financières pour des études supérieures semble contraire aux règles communautaires applicables en matière de libre circulation des travailleurs, dans le sens où celle-ci aurait comme résultat d’exclure, comme bénéficiaires, les enfants de travailleurs frontaliers.

La Commission a récemment reçu des plaintes à cet égard et procède à l’examen de la législation en cause. Par ailleurs, elle prendra les contacts nécessaires afin de recueillir des précisions sur les faits dénoncés. Sur la base de ces éléments, la Commission prendra une décision sur la suite à donner à ces plaines, y compris, le cas échéant, dans le cadre de la procédure prévue à l’article 258 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).